Tu es sûr que c’est nécessaire d’y aller ? J’en tremble, j’ai peur. De leurs regards, des larmes, de ce vide dans leur maison que j’ai dû laisser, de …

N°61, j’hésite.

Une sonnerie courte, timide : ding ! (Que dirai-je en premier ?) Dong.

Anxiété grandissante.

Des pas derrière la porte. Ma maman, assurément, puisque les deux autres doivent travailler.

Non, la petite sœur. Etonnant. Qui me serre dans ses bras sans dire un mot. Les pleurs les remplaçants.

Ma maman se tient en retrait, je la vois entre deux larmes qui floutent ma vision.

Je vais l’embrasser à son tour.

Les voilà bientôt me regardant hésiter à entrer au-delà du hall.

— Je vais passer la nuit à l’hôtel ce soir…

— Quoi ? Vraiment ? Mais je t’avais préparé un repas de bienvenue et ta sœur a pris un jour pour te voir !

— C’est très gentil à vous, mais je pense que j’ai besoin d’être un peu seul quelques heures avant de revenir avec vous.

Je viens de décider ceci à l’instant, n’ayant pas encore le contenu de la fin de ma phrase au moment-même où je la commençai. Il aurait sans doute suffit qu’une d’elles dise un seul mot, ne m’oppose un seul argument ou n’ait qu’un début d’air de déception pour que ma volonté encore dans l’œuf se brise. Au lieu de cela, elles restent sans voix, sans geste, comprenant, bien que je devine la déception sous l’impassibilité de leurs visages. Elles me laissent donc partir – je ne peux pas reculer. Elles doivent être heureuses que je sois sorti, c’est tout ce qui comptera pour elles aujourd’hui. J’affronterai le père demain.