1.1. Retour à la puanteur. La dernière fois qu’on m’autorise, mais bien parce que l’ambassadeur a insisté. De Menthon n’a pas été rancunier, et je lui en sais gré. A moi maintenant de rentabiliser tous ces efforts conjugués. Dieu est avec moi aussi, au moins quelques-uns de ses représentants que Jean aura eu la bonne idée de connaître avant que tout ne s’arrête. Je rentre dans la petite salle où ils me l’ont mis. Je n’ai pas le temps de faire des préambules, de refaire de la rhétorique, d’argumenter. Je pense que la souffrance, la peur, le temps passé depuis notre dernière rencontre parleront en ma faveur.

Pablo Neruda est mort, Jean.

— Pablo Neruda…

1.2. Jean semble comme hébété, comme cherchant ce nom dans sa mémoire, abasourdi, tentant de rassembler ses forces, de se concentrer.

— Ils l’ont tué ?

— Je ne crois pas. Il était malade, tu le sais. De toute façon qu’importe comment, ça termine pareil.

Je n’ai même pas la force d’argumenter plus, je ne vois pas ce que je pourrais lui dire de plus, qui ne soit pas une redite. En même temps répéter, répéter encore, des fois ça fois ça finit par entrer. Et puis je n’ai tant négocié juste pour dire ça, alors j’use un peu de salive et d’ingéniosité sachant que pour moi, je ne dirais pas que c’est facile, juste que c’est moins dur, puisque je n’aurais pas à en payer le prix. Ne pas y penser. Me concentrer pour le sortir des griffes de son entêtement, faire comme les meilleurs menteurs en me convainquant moi-même des sornettes que je dis. Et puis « sur le long terme on est tous morts » de toute façon.

1.3. Allez, Jean, penses-y, se sacrifier c’est très joli, ça en impose, mais on se doit encore à la vie, qui nous appelle.

Qui nous appelle…

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