§14. Alors tant qu’à voyager de nouveau ensemble nous voyageons pour de bon : 375 km à parcourir pour nous retrouver aux pieds du volcan Villarica, dont nous attaquerons l’ascension demain.

Une nuit de pur repos – mais comme une certaine fatigue me rendrait plus fort ces derniers temps ! – et nous partons mettre le monde à nos pieds. Une fois qu’il l’est nous n’avons même pas envie de marcher dessus, ni de le conquérir, quelle bagatelle, mais de rester là dans cette suspension joyeuse. Une nature magnifique s’étend à perte de vue. Je vibre intérieurement, brûlant plus fort que cette montagne éteinte pourtant potentiellement fournaise, pour que, prise par la magie de l’instant, Gladys se rapproche, après toutes ces possibilités, c’est à elle de faire le pas spécial, de franchir la ligne, de briser la fine glace qui sépare nos deux corps, je meurs dans cette attente. Moi qui espérais que cette marche aurait achevé en moi tout désir… est-il intarissable, comment s’en débarrasse-t-on, ne peut-il pas me laisser apprécier ce paysage que je viens de gagner sans plus me torturer ? Gladys se retourne vers moi avec un sourire et me pointe ces yeux-là dans le cœur, comme un couteau qui, enfoncé, me tuerais, et que je ne pourrais m’extraire sous peine de mourir. J’en ai connu des petites morts, celle-là est si longue, si vivifiante, si seulement.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *