§4. Je vais à une fête où je suis convié, que j’ai envie de voir sans y être car je ne m’y sens pas à ma place. J’ai refusé la paternité, ce n’est pas pour revenir aux jours de bonheur me nourrir au festin auquel je n’ai pas contribué. (Même si.) Aussi, comme dans les feuilletons télévisés vais-je me cacher derrière un journal pour la suivre un peu en retrait.
— El Mercurio, por favor.
— Aquí está. E°20, por favor.
— Ya. Gracias.
— Gracias a Ud, ¡Que estés bien!
J’aime l’échange service ou marchandise – argent. Le commerce des hommes y est si simple !
Un samedi. Je reste alors seul en marge de cette troupe où je n’ai officiellement pas voulu venir. Mais où je suis. Pour voir le bonheur de Luz. M’imprégner de cette joie.
Il y a la maman de Luz, son frère, la mère de Nicolas (que je ne reconnais définitivement pas), des amis à eux et les chants dans la petite église d’un quartier de San Borja. Je suis heureux pour toi, Luz !
Quelle bizarrerie, finalement, cette existence. Il fallait que je sois là : n’est-ce pas grâce à moi qu’ils se connaissent ces deux-là ? Je suis le point de commencement, ils sont tout le reste, le remplissage et la fin…
Je sens Luz qui cherche du regard dans la foule, balaye l’assemblée avec une anxiété camouflée mais que je perçois parfaitement puisque je la comprends, elle est debout à côté de son futur mari, elle me voit, me sourit légèrement, d’un léger frémissement des lèvres, d’une nuance de brillant dans ses yeux, je lui souris en retour, nous nous sommes tout dit dans ce petit instant rien qu’à nous, volé au beau milieu de la présence des autres, il ne me reste plus qu’à partir, sinon je vais encore pleurer, je pleure déjà, sois heureuse Luz.