§15. Oui, El Siglo me rassure : tout va bien. Les corporations politisées qui tentent d’impliquer d’autres secteurs d’activités échouent. Les travailleurs tiennent bon. Les réquisitions et amendes aux grévistes pleuvent. Des magasins sont ouverts de force et leurs entrepôts de marchandises destinées au marché noir découverts peu à peu. « L’appel de la SOFOFA à paralyser les industries s’est vautré dans le ridicule » annonce Corválan. Des corporations alternatives de petits patrons se séparent des autres conspirateurs. De nombreux médecins résistent aux sirènes de la sédition. Les paysans ne se prêtent pas à la grève politique. Les lycées de Santiago fonctionnent normalement. Etc. Ils veulent l’immobilisme et la désolation, ils croient avoir coupé la tête de la poule, mais celle-ci bouge encore, et court, et produit des œufs et caquette fièrement et les emmerde ! Le coup civil est pour l’instant un échec.

Pire : ce sera une victoire pour les anciens exploités, une révolution par forfait. D’ailleurs, par exemple, les travailleurs de CIC ont “pris” l’entreprise, et doublent la production… Enfin, doubleront la production, pardon, mal lu.

Et en même temps que le peuple se bat pour sa fierté et son avenir, un attentat dans les ateliers des éditions Quimantú1 a fait un mort : les fascistes détestent la culture, lire leur fait mal aux yeux, la stupidité est le terreau sur lequel ils ont planté les racines de leur idéologie de haine et de violence. Il ne faut pas les laisser gagner !

Note

  1. « En 1971, l’Etat acheta une maison d’édition privée qui fut à l’origine des Editions Quimantú, lesquelles devinrent le centre des activités culturelles de l’UP. En deux ans douze millions de livres, revues et documents (parmi lesquels huit millions de livres), incluant des journaux (líneas) de grandes diffusions qui se spécialisèrent dans l’analyse sociale. Chaque semaine de grandes œuvres littéraires été éditées et vendues très peu cher et en plus d’une occasion elles furent épuisées le jour même de leur sortie. Ce succès avait une seule explication et était très positive : pour la première fois ce type de culture se mettait à la portée des masses, qui répondaient avec enthousiasme, bien que le souci de rentabilité commerciale était totalement secondaire pour les objectifs de l’UP. Le fait que Quimantú stimulât la création de bibliothèques de syndicats et d’organisations communautaires était encore plus important pour elle, puisqu’à travers l’approvisionnement de livres à petit prix, la gauche réussit à progresser idéologiquement grâce au matériel qui se rendit ainsi disponible pour les ouvriers. » [Israel Zipper 2006, 117]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *