§11. Je passe devant un bar. Où je reconnais un membre du groupe d’action, seul, buvant une bière la tête posée sur sa main. Triste. Je sais que je ne devrais pas aller le voir, nous ne sommes pas censés nous connaître en civil. Je reviens de la Victoria une fois de plus, je suis encore empli de la bonté que je retire de cette action-là – quel contraste avec le contexte dans le lequel j’ai rencontré cet homme ! Il n’a pas l’air bien / il y a la règle. Et Jésus n’a-t-il pas enfreint la règle de temps en temps au grand dam des Pharisiens ? Et puis, j’avoue qu’il saura peut-être me renseigner sur Natalia : j’ai si peur pour elle depuis que je l’ai laissée à Temuco, peur que sa colère l’emporte.

— Oh… le Pacifiste.

— Je peux m’asseoir avec toi ?

Il me dévisage, suspicieux.

— Je suis un de tes collègues de travail, si tu veux…

Et je prends place sans attendre sa réponse. Juan est passé par là… il faut que je m’impose un peu, il n’a pas tort.

— Ah oui ? On est collègue ? Alors tu l’as vu passer, aussi, cette merde de journal qu’on doit imprimer et qui est déjà prêt à être distribué dans quelques heures, pour que tous les bons Chiliens du fric se réjouissent.

— Je ne l’ai pas vu passer, ce Mercurio. J’étais en congé aujourd’hui…

— Tu aurais mieux fait d’être là, tu nous as manqué, dis-donc…

— Qu’est-ce qu’il y a eu ?

— Eh bien tu vas dépenser 20 escudos, “Eusebio”, et voir par toi-même que le chemin de la légalité c’était une tactique de merde ! On aurait mieux fait d’attaquer le Congrès et les tuer tous un par un, si déjà Allende ne voulait pas le fermer. On se serait fait massacrer, mais au moins on ne serait pas partis tout seuls…

Adoption par la Chambre des Députés d’une motion qui accuse le président ; les généraux se réunissent secrètement – Les responsables nationaux de la CUT y compris le démocrate-chrétien Ernesto Vogel, invitent les travailleurs à renforcer la vigilance.

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