§4. Mais à ce moment-là tous les espoirs n’étaient pas encore épuisés. Il restait à Augusto Pinochet de cette invincible et mystérieuse force – ou est-ce une folie travestie ? – qui tient les hommes à l’action. La même, cette mauvaise herbe universelle, qui pousse les candidats perdus d’avance à tenter leur concours (et à parfois le réussir), les femmes battues à penser que leur mari changera…
— Général Pinochet, je pense que vous êtes la personne qui doit reprendre le poste du général Prats.
…les amoureuses que leur amant quittera enfin sa femme (il en a parlé si souvent) !), les adolescents que leur vie pourra s’épanouir ailleurs que dans cet endroit misérable (sa condition paraît toujours intolérable à cet âge-là)…
— Je vous remercie beaucoup, Monsieur le Président, de votre confiance. Je pense néanmoins que c’est mon général qui doit rester.
— Le général Prats est très fatigué et doit se reposer ; après nous lui donnerons d’autres charges.1
…l’ouvrier que sa vie morne sera un jour rompue par un événement inattendu, le prisonnier à perpétuité qu’une réforme ou une révolution lui permettra de revoir un jour la mer, la joie d’un panorama de montagne, le corps d’une femme, l’air de la liberté…
— Je vous remercie, Président, mais vous savez qu’en ce moment il est fondamental d’avoir de larges attributions dans le commandement de l’institution.
— Bien sûr, c’est logique, général. Vous les avez !
…l’infirme qu’un progrès scientifique rétablira toutes les fonctions de son corps… le croyant que le Royaume de son dieu adviendra… Tant que les hommes sont déraisonnables, ils sont encore vivants.